Patricia
Kindermans-Rousseau « façon confessions équestres »
Ma
maman m’a toujours dit qu’il fallait éviter
de dire trop souvent « je » et « moi » dans
une conversation. Voilà donc qu’en quelques lignes
je vais balayer un précepte qu’elle a mis trente
ans à m’inculquer…Je (ça y est : ça
commence !)suis passionnée par les chevaux depuis toujours,
mais ça, vous deviez vous en douter… Toute ma vie
a été dirigée par eux, mes études,
mes choix de vie, mes « non-vacances », mes lectures,
mes conversations. En fait, je crois que je dois être-pour
ceux que les chevaux n’intéressent pas vraiment-quelqu’un
d’assez barbant à fréquenter…
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J’ai
commencé à monter à cheval à l’âge
de huit ans. A quinze ans, j’ai reçu mon premier
cheval, une jument rouanne du nom de Havane. Elle a aujourd’hui
rejoint le paradis des chevaux, de même que Bendy qui avait
pris sa suite. Aujourd’hui, Minha Lua, Martine et Acoma
sont les chevaux que je monte et que j’aime.Vous remarquerez
que ce ne sont que des juments car je suis à vrai dire
très « jument » : j’adore leur caractère
fort et parfois instable, elles ne sont pas tous les jours disposées à m’offrir
le meilleur d’elles-mêmes, moi non plus, donc on
est faites pour s’entendre… Dès l’âge
de 20 ans, je me suis passionnée pour le dressage classique
et j’ai commencé à suivre des cours particuliers
hebdomadaires jusqu’à aujourd’hui. Mon premier
professeur fut Sue Oliveira, belle-fille du Maître portugais
Nuno Oliveira dont je suivis les cours une petite dizaine d’années.
Ensuite, je pris cours avec Hélène Arianoff, elle
aussi élève du Maître et entraîneur
de cavaliers de dressage dans des zones du monde aussi lointaines
que l’Australie. Je suivis des stages réguliers
avec Pedro Almeida, ancien écuyer en chef du Haras National
du Portugal.
Il y a une petite dizaine d’années, suite à d’énormes
problèmes de comportement que je rencontrais avec Bendy, mon cheval
de dressage, je fus tentée d’aborder l’équitation
de manière un peu différente. J’étais partie
aux Etats-Unis pour réaliser un documentaire sur les cow-boys
et avais eu l’occasion de rencontrer là-bas quelques cavaliers
extraordinaires qui m’ont appris que le cheval c’est plus
qu’une belle mécanique, que c’est aussi un esprit
avec lequel il importe de communiquer pour obtenir de meilleures performances équestres
et une monture plus heureuse. J’ai donc commencé à suivre
des cours avec Ben De Ruyter, qui applique depuis près de trente
ans les méthodes de ces cavaliers pour lesquels j’éprouve
une réelle admiration. Il est toujours mon professeur -et ami
-aujourd’hui. Ne me parlez pas trop des chuchoteurs qui inondent
le marché (parce qu’il s’agit bien ici de marché)
depuis une dizaine d’années ou alors, demandez-moi pourquoi
j’estime qu’ils donnent aux gens une image fausse de ce que
devrait être l’équitation et le rapport aux chevaux…
Ca va donc peut-être vous paraître bizarre, mais je pratique
de manière indifférenciée équitation classique
et « horsemanship » (on va appeler ça comme ça
même si ce mot ne veut pas dire grand’chose) et vous risquerez
donc bien, selon mon humeur, de me voir faire une épaule en dedans
sur Acoma, mon cheval « western » et mettre une selle américaine
sur Martini mon cheval de dressage et de lui demander un « join
up » avant de la monter… Ne cherchez pas à comprendre
: j’éprouve un profond respect pour la bonne équitation
de quelque horizon qu’elle soit et j’aime piquer à gauche
et à droite, à l’Est et à l’Ouest, au
Nord et au Sud, des méthodes d’entraînement qui me
paraissent intéressantes et dont vous pourrez bénéficier
si vous vous inscrivez à mes leçons… En ce qui concerne
l’obstacle, je l’ai pratiqué dans ma jeunesse mais
mon médecin m’a formellement déconseillé d’en
poursuivre la pratique puisque, depuis une bonne quinzaine d’années,
dès que je saute une barre, j’arrête de respirer et
je deviens toute bleue (mon médecin m’a dit que c’était
très mauvais pour la santé, d’arrêter de respirer
!). Donc, comme j’ai passé l’âge où ça
fait du bien de se faire du mal, je n’insiste plus et je laisse
l’obstacle aux autres qui font ça très bien…
Pour le reste, vous pourrez constater que mes chevaux sont, pour la plupart
des « cas sociaux »mais je les adore, avec leurs qualités
et leurs défauts et même si elles ne sont pas d’un
niveau extraordinaire (elles sont encore jeunes), j’ai au moins
la satisfaction de leur avoir appris moi-même presque tout ce qu’elles
savent…
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Faut-il
rentrer dans des cases pour être « quelqu’un de
bien » ?
Combien
d’entre nous, cavaliers et heureux propriétaires
de chevaux, avons déjà eu à répondre à ces
insidieuses questions, posées souvent d’ailleurs
par d’autres cavaliers, avides de mieux cerner notre personnalité équestre
: « Ah, vous montez à cheval ? Et vous avez un cheval
? »Questions suivies des inévitables : « Et
vous avez quoi comme cheval ? Et vous faites quoi avec lui ? »
J’ai pour ma part réfléchi longuement à une
réponse susceptible de satisfaire la curiosité de mes interlocuteurs
qui tous, s’attendent à une réponse du type : « J’ai
un Quarter Horse donc je fais de l’équitation américaine
ou encore : « J’ai un sBs donc je fais de l’obstacle » ou « J’ai
un Arabe donc je fais de l’endurance ». Car le monde équestre
est ainsi fait : il manque parfois cruellement d’imagination et
de tolérance. Qui donc a décrété un jour
qu’il fallait absolument se dévouer corps et âme à une
et une seule discipline et n’aimer qu’un seul type de cheval
(celui, bien sûr, qui convient à la discipline que l’on
s’est choisie) ? Qui donc a décidé qu’il n’y
a qu’en passant des examens qu’on peut véritablement
savoir où en est notre science équestre et à quel
degré (au propre comme au figuré) elle se situe ? Ah, que
notre société est ordonnée, gourmande d’étiquettes
et de tiroirs où elle peut commodément ranger tout et tout
le monde !
Alors moi, j’ai trouvé : quand quelqu’un me demande
ce que je fais avec mes chevaux, je prends mon air le plus professoral
pour leur répondre que je pratique avec assiduité la « F.I.N.
Riding » et cette réponse, je l’avoue, impose d’abord
le respect. Mais en général, mon interlocuteur –qui
ne veut pas mourir idiot et me trouve subitement passionnante- me demande
ce qu’est cette « F.I.N. Riding » (prononcez « FINN » s’il-vous-plaît)
et je réponds « F.I.N. est l’abréviation de « Fingers
in the Nose ». Je pratique donc, en Français dans le texte,
l’équitation « les Doigts dans le Nez », ce
qui ne veut strictement rien dire, sinon que ma quête personnelle
dans l’art de monter à cheval consiste à chercher
et à appliquer toutes les techniques – de quelque horizon
géographique ou culturel qu’elles puissent venir- permettant
d’obtenir des chevaux heureux, équilibrés, légers,
souples et agréables à monter, ce qui, en soi, est déjà un
vaste programme.
Ce que je veux dire, c’est qu’il ne devrait pas être
nécessaire de porter une étiquette précise de « cavalier
d’obstacle » ou de « cavalier de dressage » ou
encore de « cavalier d’endurance » pour paraître
au yeux du monde équestre comme quelqu’un de sérieux
et de fréquentable : l’essentiel est d’être
animé par la passion et de mettre tout en œuvre pour rendre
sa monture heureuse au quotidien. Le mépris affiché pour
les « petits cavaliers du dimanche » et pour les « chevaux
de rien » ne devrait pas exister.
Alors, si vous partagez cette opinion, si vous aussi vous sortez des
sentiers battus et faites partie de ces nombreux cavaliers « inclassables »lassés
de ne savoir que répondre quand on leur demande ce qu’ils
font avec leurs chevaux, rejoignez-moi au F.I.N. Riding Institute : l’inscription
est gratuite, la cotisation annuelle inexistante et le nombre de membres
actifs illimités. F.I.N. Riders : le monde vous appartient !
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